La signification profonde revêtue par la compétition chez les Grecs était placée
sous la triple dimension de la mort, de la guerre et du sacré, trois aspects
très étroitement imbriqués. Quel rapport avaient les joutes sportives avec la
mort ?
Les épopées homériques décrivent des Jeux funèbres, célébrés en l'honneur d'un
héros mort au combat. Sur le plan historique, ces Jeux permettaient sans doute
de partager entre les vainqueurs les biens du défunt. Mais le symbole même de
ces rites est riche et dépasse le contexte immédiat de la guerre de Troie.
On retiendra l'interprétation de René Girard (La violence et le sacré).
Il conçoit ces Jeux comme une forme d'exorcisme ou de libération des pulsions
meurtrières de la communauté. La mort jouée est une mort symbolique qui purifie
en quelque sorte la communauté de la mort réelle qui pèse sur elle : cette expurgation
a besoin de l'immolation d'un bouc émissaire :
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soit une immolation réelle (Iphigénie)
- soit une immolation symbolique (les taureaux ou moutons prennent la place des
hommes : cf. Abraham et Isaac, Genèse 22, 13)
- soit une immolation «jouée» : le combat du stade. La mort est exorcisée car
elle est tout à la fois acceptée, niée et dépassée. Le vaincu, étant donné qu'il
n'est pas vraiment mort fait l'apprentissage de l'immortalité au même titre
que le vainqueur qui, lui, a traversé sain et sauf les épreuves.
Ainsi, par le jeu du symbole, et notamment par le combat pacifique des compétitions,
l'homme a appris à maîtriser ses angoisses.
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Cf. Violaine Vanoyeke, La naissance des Jeux olympiques et le sport
dans l'Antiquité, Paris, Les Belles Lettres, 1992, 195 p.
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